En 2015, 200 scientifiques ont appelé à limiter la production et l’utilisation de PFAS (prononcer “pifasse”) au niveau mondial 1 .
Aujourd’hui, les niveaux de concentration des substances PFAS dans les eaux de pluie, de surface ou souterraines aux quatre coins du globe sont tels « [qu’une] nouvelle limite planétaire a été dépassée », selon une étude publiée en août 2022 2.
Les limites planétaires représentent les limites physiques à ne pas dépasser, sous peine de risquer le franchissement de « points de basculement ». Avec pour conséquence d’exposer l’humanité à des changements brutaux, difficilement prévisibles et potentiellement catastrophiques.
Pour en savoir plus sur la notion de limite planétaire, vous pouvez consulter notre article qui mentionne les 9 limites planétaires.

Point clé 1 – Quelle est l’ampleur de la pollution par les polluants éternels ?
Les PFAS, à savoir les composés per- et poly-fluoroalkylés (Per and PolyFluorinated Alkyl Substances en anglais) constituent une famille chimique complexe regroupant plusieurs milliers de composés distincts.
Antiadhésives, imperméabilisantes, résistantes aux fortes chaleurs, les substances PFAS sont largement utilisées depuis les années 1950 dans divers domaines industriels et produits de consommation courante :
- emballages alimentaires, notamment pour les hamburgers, kebabs et pizzas ;
- textiles, notamment la technologie Gore-Tex ;
- revêtements antiadhésifs, dont le Téflon ;
- cosmétiques ;
- dispositifs médicaux, comme les prothèses de hanches ;
- mousses anti-incendie ;
- produits phytosanitaires, etc.
Pourtant, la toxicité du PFOA, l’un des PFAS les plus utilisés, est connu depuis 1961 par les sociétés DuPont et 3M 3 .
En 2019, un rapport de Santé Publique France a indiqué que les deux principaux PFAS (PFOA, PFOS) ont été détectés chez 100% des 744 adultes et les 249 enfants testés 4 .
Dans les eaux de surface françaises, des PFAS n’ont été détectés « que » dans 36% des échantillons analysés 5 .
Leur présence est pourtant probablement largement sous-estimée en raison de la grande hétérogénéité des méthodes d’analyse employées et des substances recherchées.

Source : Etat des lieux de la présence de PFAS dans les eaux de surface en France, Générations futures, 12 janvier 2023.
Selon une enquête journalistique du Monde et de 17 autres médias publiée en février 2023 3 :
➡️ l’Europe compte plus de 17 000 sites contaminés à des niveaux qui requièrent l’attention des pouvoirs publics (au-delà de 10 nanogrammes par litre) ;
➡️ la contamination y atteint des niveaux jugés dangereux pour la santé par les experts que nous avons interrogés (plus de 100 nanogrammes par litre) dans plus de 2 100 « hotspots ».
Vous pouvez consulter la carte qui montre les sites de contamination aux PFAS détectée et présumée en Europe, sur le site du journal Le Monde.
S’agissant des sites de production de PFAS en Europe :
- la France occuperait la deuxième place du podium avec cinq sites de production, et
- l’Allemagne la première place, avec six sites de production.
Les autorités estiment que si aucune action n’est menée dans les trente prochaines années, 4,4 millions de tonnes de PFAS seront relâchées dans l’environnement 6 .
Point clé 2 – PFAS : pourquoi parle-t-on de “polluants éternels” ?
La caractéristique commune des substances PFAS est d’avoir une chaîne carbonée comportant au moins un atome de carbone lié à 3 ou 2 atomes de Fluor.
Il en existe deux types 7 :
- les PFAS à chaîne longue qui contiennent de 6 à 12 atomes de carbone (PFAS à longue chaîne carbonée) ;
- les PFAS à chaîne courte qui contiennent moins de 8 atomes de carbone. Le seuil pour distinguer entre chaînes longues et courtes est fixé entre 6 et 8 atomes de carbone selon les composés.

Source : PFAS Carbon chain length, Waste 360, 2021
En raison de la très grande stabilité de la liaison carbone-fluor, qui est l’une des plus fortes de la chimie organique, les PFAS ne se dégradent pas après utilisation ou rejet dans l’environnement.
Surnommées « forever chemicals », ou polluants éternels, ce sont les substances d’origine anthropique les plus persistantes connues à ce jour.
Elles peuvent rester dans l’environnement pendant des décennies, voire des siècles.
L’utilisation variée de ces composés chimiques, combinée à leur caractère très persistant, entraînent une contamination de tous les milieux : l’eau, l’air, les sols et les sédiments.
Or, d’importantes quantités de PFAS sont relâchés dans l’environnement à l’occasion de 8 :
- la production de PFAS ;
- la fabrication de produits faisant intervenir des PFAS ;
- l’utilisation de ces produits ;
- et la gestion des déchets contenant des PFAS.

Les PFAS à chaîne longue se fixent et s’accumulent dans les sols, les sédiments et les organismes vivants. C’est ce que l’on appelle la bioaccumulation. Cela entraîne un risque élevé de contamination des aliments, en particulier ceux provenant de la mer.
Au cours des dernières décennies, les PFAS à chaîne longue ont été substitués en partie par des PFAS à chaîne courte, plus solubles dans l’eau et plus mobiles : des traces ont été détectées jusque dans les océans Arctique et Antarctique 9 .
Ces derniers restent persistants et peuvent présenter un niveau équivalent de préoccupation.
Cette « substitution regrettable » a permis aux industriels de garder une longueur d’avance sur la réglementation3 .
Point clé 3 – Quel est l’impact sur la santé des PFAS ?
L’exposition à un certain nombre de PFAS a été associée à de multiples effets néfastes sur la santé humaine.
En effet, les études épidémiologiques montrent l’existence d’associations significatives ou suggestives entre les PFAS et des effets 10 :
✔️ cancérogènes, notamment des cancers du testicule et des reins ;
✔️ néfastes sur les systèmes reproductif et hormonal (certains sont des perturbateurs endocriniens) ainsi que sur le système immunitaire :
- diminution de la réponse immunitaire aux vaccins ;
- dysfonctionnements du foie ;
- baisse des niveaux hormonaux ;
- faible poids et petite taille de naissance ;
- obésité ;
- retard de la puberté ;
- hyperthyroïdie ;
- cholestérol élevé ;
- colite ulcéreuse.
Il s’agit généralement de risques chroniques, c’est-à-dire liés à une exposition répétée et à long terme .

Point clé 4 – Aujourd’hui : quelle réglementation s’applique ?
Actuellement, la réglementation relative aux PFAS est parcellaire et lacunaire.
Deux axes semblent se dégager de cette réglementation.
Le premier axe est la réduction à la source par des mesures de restriction ou d’interdiction de la fabrication et de l’utilisation de certains PFAS.
Cette réglementation cible des substances, des usages et des milieux particuliers.
Néanmoins, la réglementation n’encadre pas de manière globale leur production et leurs usages.
Le second axe est la surveillance :
- de la présence des PFAS dans l’environnement, en particulier dans les milieux aquatiques ;
- de l’exposition aux PFAS, et de ses impacts sur la santé et l’environnement.
Toutefois, les connaissances scientifiques sur la présence des PFAS et leurs impacts sur la santé et l’environnement ne sont pas à la hauteur des enjeux. Il en va de même pour les technologies de surveillance des PFAS et de dépollution.
➡️ Au niveau international, quelle est la réglementation applicable ?
Entrée en vigueur le 17 mai 2004, la Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants interdit certains polluants particulièrement toxiques et persistants.
La Convention réglemente plusieurs composés de la famille des PFAS12 , dont :
– PFOS = restriction de la production et de l’utilisation depuis 2009 ;
– PFOA = interdiction à l’import, l’export et à la production depuis 2019 ;
– PFHxS = interdiction de la production et de l’utilisation en vigueur à la fin de l’année 2023.
➡️ Au niveau de l’Union européenne, quelle est la réglementation applicable ?
🔸 Réduction à la source des PFAS au niveau de l’Union européenne
Convention de Stockholm : les deux principaux, le PFOA et le PFOS, ainsi que leurs dérivés, font l’objet d’interdiction et de restriction13 .
Règlement REACH : dans le cadre du règlement « REACH » relatif aux produits chimiques, un certain nombre de PFAS figurent dans la liste des substances extrêmement préoccupantes (HPFO-DA, PFBS, PFHpA)14 .
Lorsqu’une substance figure sur cette liste, les importateurs, producteurs et fournisseurs d’articles contenant cette substance avec une concentration supérieure à 0,1 % sont soumis à plusieurs obligations :
- obligation d’information des clients tout au long de la chaîne d’approvisionnement ;
- obligation de notification de ces produits dans la base de données SCIP de l’ECHA.
Directive eau potable : la directive « Eau potable » 2020/2184 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine prévoit que :
- la Commission européenne doit établir de lignes directrices techniques pour les méthodes d’analyse et de surveillance des PFAS au plus tard le 12 janvier 2024 ;
- la limite de qualité pour les PFAS dans les eaux destinées à la consommation humaine, fixée à 0,1 µg/L, doit être respectée au plus tard le 12 janvier 2026. En attendant l’élaboration de méthodes permettant d’analyser la totalité des PFAS, l’indicateur utilisé est la somme de 20 PFAS.
Denrées alimentaires d’origine animale : depuis le 1er janvier 2023, les denrées alimentaires d’origine animale dont les teneurs en PFAS (PFOS, PFNA, PFOA, PFHxS) excèdent certains seuls ne peuvent pas être mises sur le marché 15 .
Denrées alimentaires – EFSA : l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a fixé un seuil de sécurité pour les principaux PFAS (PFOA, PFOS, PFNA et PFHxS).
Il s’agit d’un seuil non contraignant qui a pour objet d’informer sur les risques pour la santé humaine et protéger contre une exposition aux PFAS par l’intermédiaire de l’alimentation.
Ce seuil correspond à une dose hebdomadaire tolérable (DHT) de groupe de 4,4 ng/kg de poids corporel par semaine 29 .
🔸 Surveillance des PFAS au niveau de l’Union européenne
Eaux de surface : le PFOS est identifié comme substance dangereuse prioritaire. A ce titre, l’Union européenne a fixé des seuils de concentration dans les eaux de surface, à savoir17 :
- une norme de qualité environnementale à 0,65 ng/L. Il s’agit de la valeur moyenne annuelle à ne pas dépasser pour atteindre le bon état chimique, afin de garantir une protection contre les expositions à long terme,
- une concentration maximale admissible à 36 µg/L. Il s’agit de la valeur maximum à ne dépasser lors d’une mesure pour atteindre le bon état chimique, afin de garantir une protection contre les expositions à court terme.
Cette surveillance permet :
=> de mieux connaître l’état des milieux, et
=> d’identifier les causes de leur dégradation, pour orienter et évaluer les actions, avec l’objectif d’améliorer la qualité des eaux (chimique et écologique).
➡️ Quelle est la réglementation applicable en France ?
POINT DE VIGILANCE : le droit applicable en France est à la fois le droit international, le droit européen et le droit français.
🔸 Réduction à la source des PFAS en France
ICPE : seul le PFOS fait l’objet d’une valeur limite d’émission. Depuis le 1er janvier 2023, le seuil est fixé à 25 μg/L de PFOS pour les rejets des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) relevant du régime d’autorisation dans le milieu naturel 18 .
🔸 Surveillance des PFAS en France
ICPE : Les effluents de certaines installations de traitement de déchets relevant du régime de l’autorisation et de la directive relative aux émissions industrielles font l’objet d’une surveillance trimestrielle pour le PFOS et PFOA depuis le 17 août 2022 19 .
Eau : depuis 2022, outre le PFOS, certains PFAS font l’objet d’une surveillance dans le cadre de l’évaluation de l’état des masses d’eau 20 .

Point clé 5 – Et demain ? Quel sera le cadre juridique des polluants éternels ?
➡️ Au niveau de l’Union européenne, quelles sont les évolutions réglementaires à venir ?
Denrées alimentaires : la Commission européenne 16 :
- recommande aux Etats membres de surveiller la teneur en PFAS dans les denrées alimentaires de 2022 à 2025 ;
- fixe des valeurs indicatives dans certains aliments. Le dépassement de ces valeurs devra déclencher « une enquête de suivi visant à déterminer les causes de la contamination », mais sans que cette enquête ne porte « préjudice à la possibilité de mettre sur le marché une denrée alimentaire ».
Ambition Zéro Pollution : la Commission européenne a publié en octobre 2020 sa stratégie de l’Union européenne pour la durabilité dans le domaine des produits chimiques.
Cette stratégie est le premier pas sur la voie de l’ambition « zéro pollution » pour un environnement exempt de substances toxiques annoncée dans le pacte vert pour l’Europe21 .
Les objectifs fixés sont les suivants :
- la suppression progressive des PFAS dans les produits de consommation, sauf s’il est prouvé que leur utilisation est essentielle pour la société ;
- aborder les PFAS dans le cadre d’une approche globale ;
- aborder les problèmes liés aux PFAS au niveau international ;
- fournir un soutien financier à la recherche et l’innovation pour :
=> remédier aux contaminations par les PFAS dans l’environnement et les produits ;
=> trouver des alternatives aux PFAS.
Modification du règlement REACH : l’agence européenne des produits chimiques (ECHA) a détaillé le 7 février 2023 sa proposition de modification du règlement dit « REACH ».
L’objectif est de restreindre la production, l’utilisation et la mise sur le marché de PFAS 6 .
En raison de la complexité et du coût de leur élimination, l’objectif est de limiter les PFAS :
– soit par leur interdiction totale,
– soit par leur interdiction avec des dérogations pour certains usages. C’est cette option qui semble être privilégiée.
Cette proposition sera soumise à consultation le 22 mars 2023, puis à la Commission européenne et au Parlement Européen, pour une entrée en vigueur des restrictions prévue à l’horizon 2026 ou 2027.
➡️ Quelles sont les évolutions à venir de la réglementation française ?
Eau : le 25 janvier 2023, le ministère de la transition écologique a lancé une consultation des parties prenantes (fédérations professionnelles, collectivités, associations) sur un projet d’arrêté ministériel prévoyant la surveillance des PFAS dans les rejets aqueux de certains secteurs industriels listés par le projet d’arrêté 22 .
Le projet de texte liste :
✔️ les secteurs d’activités concernés par la surveillance des PFAS ;
✔️ les substances à analyser ;
✔️ les conditions techniques de réalisation des analyses, et
✔️ le calendrier de mise en œuvre de la campagne.
De plus, un plan d’actions ministériel sur les PFAS a été publié le 17 janvier 2023 23 .
Ce plan prévoit notamment de :
- porter au niveau européen une interdiction large pour supprimer les risques liés à l’utilisation ou à la mise sur le marché des PFAS, plutôt que de travailler par substances ;
- déterminer, pour les principaux PFAS, des valeurs maximales de concentration à respecter dans les milieux, et assurer une veille sur les progrès des connaissances en matière d’analyse, d’impact et de traitement ;
- améliorer la connaissance des rejets et de l’imprégnation des milieux, notamment en investiguant, lors des cessations d’activité, l’imprégnation des sols en PFAS ;
- réduire les émissions des industriels de manière significative en identifiant les sites industriels potentiellement émetteurs de quantités significatives de PFAS grâce aux résultats de la mission d’inspection générale sur les sources possibles de PFAS.
Point clé 6 – Quels sont les procès sur les PFAS dans le monde (Etats-Unis, Belgique, Italie) ?
De nombreux procès mettent en cause des producteurs de PFAS en Europe et aux Etats-Unis.
🔸 Procès aux Etats-Unis
Plus de 6 400 procès en lien avec les PFAS sont en cours.
La majorité des procès vise la société DuPont.
La société 3M risquerait 28 milliards d’euros dans ces poursuites, selon une analyse de BloombergLaw 24 .

La majorité de ces contentieux sont des actions en réparation pour des préjudices corporels
Pour aller plus loin, vous pouvez regarder le film Dark Waters. Ce film retrace la découverte par l’avocat Rob Bilott du scandale d’une pollution au PFOA aux Etats-Unis. Le procès qui s’ensuit met en cause un site industriel de production de Téflon exploité par la société DuPont à Parkersburg en Virginie-Occidentale.
🔸 Procès en Belgique
Des taux élevés de PFOS, attribués à une usine de la société 3M, ont été relevés dans les sols lors de travaux routiers pour le contournement de la métropole d’Anvers.
Les résultats d’une enquête auprès de 800 personnes de la région ont montré que près de 90% d’entre elles présentent des taux trop élevés de PFAS dans le sang.
En août 2021, des riverain.e.s et l’association Greenpeace ont saisi la justice pour demander :
- l’élaboration d’un plan garantissant l’assainissement des communes riveraines, et
- que l’assainissement ne soit pas compromis par les travaux routiers.

Le 6 juillet 2022, la société 3M a conclu un accord avec les autorités régionales de Flandres pour le paiement de plus d’un demi-milliard d’euros en vue de :
– dépolluer les sols ;
– limiter la pollution de l’air, et
– contribuer aux politiques régionales de protection de l’environnement.
En outre, un groupe constitué de 400 familles poursuit la société 3M pour « troubles anormaux de voisinage ».
Une instruction pénale est en cours contre la société 3M 25 .
🔸 Procès en Italie
Les anciens dirigeants de l’entreprise Miteni (Mitsubishi-Eni) sont sous le coup d’une enquête pénale pour une pollution aux PFAS.
Il s’agit d’une pollution de la deuxième plus grande nappe phréatique d’Europe par une usine Miteni située à Trissino, en Vénétie.
Aussi, les résultats d’une enquête auprès de 500 personnes ont révélé des taux anormalement élevés de PFAS dans le sang des personnes résidant dans la zone la plus exposée.
La contamination des eaux de boissons et des sols s’étend sur plus de 200 kilomètres carrés et toucherait jusqu’à 350 000 personnes en Vénétie.
Un plan de surveillance sanitaire sur plus de 72 000 personnes a été mis en place par les autorités.

Les anciens dirigeants de la société Miteni pourraient être appelés à comparaître pour désastre environnemental volontaire et empoisonnement des eaux26 .
Par ailleurs, l’ancien et le nouveau directeur d’une usine de la société Solvay située à Spinetta Marengo, dans le Piémont, sont inculpés pour désastre environnemental volontaire.
Il s’agit également d’une pollution des eaux souterraines par des PFAS27 .
Point clé 7 – Et en France, quels sont les procès en cours concernant les polluants éternels ?
Au sud de Lyon, la plateforme industrielle de Pierre-Bénite accueille :
✔️ le site de la société Arkema, soumis à autorisation et classé Seveso seuil haut au titre de la réglementation sur les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) ;
✔️ le site de la société Daikin Chemical, soumis à autorisation au titre de la réglementation ICPE.

Dans le cadre de la production de polymères fluorés, le site d’Arkema manipulent 2 PFAS (6:2FTS, PFHxA), d’autres PFAS ayant été utilisés par le passé.
En mai 2022, une enquête diffusée sur France 2 a révélé :
- des taux élevés de certains PFAS dans l’eau, l’air et le sol autour de la plateforme industrielle ;
- la présence de PFAS dans le lait maternel des femmes vivant dans l’agglomération ;
- la présence de PFAS dans l’eau du robinet à des concentrations supérieures à 0,1 µg/L, pour la somme de 20 PFAS. Les services de l’Etat ont confirmé ce constat28 .
Pour en savoir plus, vous pouvez consulter l’enquête journalistique Vert de Rage sur les polluants éternels.
👉 Le 31 mai 2022, le cabinet KAIZEN AVOCAT a déposé deux requêtes fondées sur l’article L. 216-13 du code de l’environnement auprès du procureur de la République, aux fins de faire cesser des atteintes graves à l’environnement et à la santé publique commises par deux ICPE de la Vallée de la Chimie, dont le site d’Arkema.
👉 Pour en savoir plus, vous pouvez consulter notre article Le référé pénal environnemental : un outil efficace pour préserver l’environnement.
Par un arrêté préfectoral du 23 septembre 2022, le préfet du Rhône a prescrit à Arkema :
- d’arrêter l’utilisation d’un PFAS, le 6:2 FTS, au plus tard au 31 décembre 2024 ;
- d’arrêter l’utilisation de tout PFAS en tant que surfactant sur le site.
Cet arrêté préfectoral pose un précédent important, car il encadre l’utilisation de l’ensemble des PFAS sur le site sur le fondement de la réglementation ICPE.
Aujourd’hui, l’ampleur de la pollution est telle que les services de l’Etat recommandent :
– de ne pas consommer les poissons pêchés dans le Rhône en aval de Pierre-Bénite et dans le Garon ;
– aux personnes résidant sur cinq communes situées à proximité et disposant d’un poulailler de ne pas consommer les œufs produits et la chair des volailles.
Pour en savoir plus, vous pouvez consulter le site internet dédié à l’action dans la Vallée de la chimie de l’association Notre Affaire à Tous.
Que retenir ?
Les composés perfluorés, ou PFAS, sont les substances d’origine anthropique les plus persistantes connues à ce jour.
Utilisés depuis 1950 pour leurs propriétés antiadhésives, imperméabilisantes et résistantes aux fortes chaleurs, les PFAS sont présents dans tous les milieux et aux 4 coins de la planète.
Pourtant, la toxicité du PFOS est connue par les sociétés DuPont et 3M depuis 1961.
L’exposition chronique aux PFAS est associée à l’existence de multiples effets néfastes pour la santé humaine.
La réglementation relative aux PFAS, actuellement parcellaire et lacunaire, peut être structurée en deux axes :
- la réduction à la source des PFAS par des mesures de restriction ou d’interdiction ;
- la surveillance de la présence, de l’exposition et des effets des PFAS sur la santé et l’environnement.
Actuellement, les connaissances scientifiques et technologiques en matière de surveillance, d’impacts sanitaires et de dépollution ne sont pas à la hauteur des enjeux.
Au niveau international, deux PFAS font l’objet d’interdiction ou de restriction, un troisième devant être interdit à la fin de l’année 2023.
Actuellement, voici le résumé de la réglementation applicable au niveau de l’Union européenne :
- trois PFAS figurent dans la liste des substances extrêmement préoccupantes. Les importateurs, producteurs et fournisseurs d’articles contenant ces PFAS sont soumis à des obligations d’information et de notification ;
- des teneurs maximales en PFAS ont été fixées pour certaines denrées alimentaires d’origine animale ;
- le PFOS fait l’objet d’une surveillance dans les eaux de surface ;
- la limite de qualité pour les PFAS dans les eaux destinées à la consommation humaine fixée à 0,1 µg/L doit être respectée au plus tard le 12 janvier 2026 ;
En France, s’ajoute les réglementations suivantes au titre du droit des ICPE et du droit de l’eau :
=> le PFOS fait l’objet d’une limite valeur d’émission pour les rejets des installations classées dans le milieu naturel ;
=> le PFOS et le PFOA font l’objet d’une surveillance trimestrielle dans les effluents de certaines installations de traitement de déchets ;
=> certains PFAS font l’objet d’une surveillance dans le cadre de l’évaluation de l’état des masses d’eau.
La réglementation relative au PFAS est en voie d’évolution, tant en Europe qu’en France.
Perspectives d’évolution de la réglementation au niveau de l’UE :
- la Commission européenne doit établir des lignes techniques directrices pour les méthodes d’analyse et de surveillance des PFAS au plus tard le 12 janvier 2024 ;
- l’ECHA propose de modifier le règlement REACH pour limiter les PFAS. L’option privilégiée est l’interdiction globale des PFAS à l’horizon 2026 ou 2027, avec des dérogations pour certains usages ;
- à plus long terme, la Commission européenne a fixé plusieurs objectifs, dont :
✔️ la suppression progressive des PFAS non essentiels pour la société dans les produits de consommation ;
✔️ une approche globale de la réglementation relative aux PFAS ;
✔️ soutenir la recherche pour la dépollution et le développement d’alternatives.
Perspectives d’évolution de la réglementation en France :
- un projet d’arrêté prévoyant la surveillance des PFAS dans les rejets aqueux de certains secteurs industriels est en cours de consultation ;
- un plan d’action ministériel publié le 17 janvier 2023 prévoit notamment de :
✔️ porter au niveau européen une interdiction large des PFAS ;
✔️ déterminer des valeurs maximales de concentration à respecter dans les milieux ;
✔️ significativement réduire les émissions des industriels.
De nombreux procès mettent en cause des producteurs de PFAS, notamment aux Etats-Unis, en Belgique, en Italie et en France.
En France, le cabinet KAIZEN AVOCAT a déposé en 2022 deux requêtes fondées sur l’article L. 216-13 du code de l’environnement auprès du procureur de la République, aux fins de faire cesser des atteintes graves à l’environnement et à la santé publique commises par deux ICPE de la Vallée de la Chimie, dont le site d’Arkema.
Références
1. Déclaration de Madrid alertant sur l’urgente nécessité pour la communauté internationale de coopérer pour limiter la production et l’utilisation de PFAS, 1er mai 2015, traduction en français
2. Dépassement d’une nouvelle limite planétaire : Outside the Safe Operating Space of a New Planetary Boundary for Per- and Polyfluoroalkyl Substances (PFAS), Environmental Science & Technology, 2 août 2022
3. Révélations sur la contamination massive de l’Europe par les PFAS, ces polluants éternels, Le Monde, 23 février 2023
4. Détection de PFOA et de PFOS dans des prélèvements sanguins en France: Programme nationale de biosurveillance Esteban 2014-2016, Santé publique France, septembre 2019
5. Etat des lieux de la présence de PFAS dans les eaux de surface en France, Générations futures, 12 janvier 2023
6. Proposition de restriction des PFAS à l’échelle de l’Union européenne : Communiqué de presse, ECHA, 7 février 2023
7. Distinction entre PFAS à chaîne longue et courte : Substitution des composés PFAS, INERIS ; PFAS Carbon chain length, Waste 360, 2021
8. Dispersion de PFAS dans l’environnement : Document de travail sur la stratégie en matière de produits chimiques, Commission européenne, octobre 2020
9. PFAS : des substances chimiques dans le collimateur, ANSES, 12 mai 2022
10. Compte-rendu sur les PFAS et les risques chimiques émergents en Europe, Agence européenne de l’environnement, 12 décembre 2019
11. Impacts des PFAS sur la santé, DREAL Auvergne-Rhône-Alpes, novembre 2022
12. Nouveaux polluants organiques persistants listés en annexe de la Convention de Stockholm
13. Interdiction des PFOS au sein de l’UE : Règlement (UE) 2019/1021 du 20 juin 2019
14. PFAS faisant partie de la liste des substances extrêmement préoccupantes : Article sur les PFAS, ECHA
15. Teneurs maximales de PFAS dans les denrées alimentaires d’origine animale : Règlement (UE) 2022/2388 du 7 décembre 2022
16. Surveillance des PFAS dans les denrées alimentaires : Recommandation (UE) 2022/1431 du 24 août 2022
17. Surveillance du PFOS dans les eaux de surface : Directive 2013/39/UE du 12 août 2013
18. Valeurs limites d’émission du PFOS : Arrêté du 2 février 1998 modifié
19. Surveillance du PFOA et du PFOS dans les effluents de certaines installations de traitement de déchets : Arrêté du 17 décembre 2019
20. Surveillance de certains PFAS dans les milieux aquatiques : Arrêté du 25 janvier 2010 modifié par l’arrêté du 26 avril 2022
21. Suppression progressive des PFAS dans les produits de consommation au niveau de l’Union européenne : Stratégie de l’Union européenne pour la durabilité dans le domaine des produits chimiques, Commission européenne, octobre 2020
22. Lancement d’une consultation sur un projet d’arrêté ministériel prévoyant la surveillance des PFAS dans les rejets aqueux de certains secteurs industriels
23. Plan d’actions ministériels sur les PFAS, 17 janvier 2023
24. Pollutions aux PFAS aux Etats-Unis : Article de BloombergLaw, 23 mai 2022
25. Pollutions aux PFAS à Anvers par la société 3M : Communiqué de presse de Greenpeace, 24 janvier 2023
26. Pollutions aux PFAS à Trissino par la société Miteni : Article de Libération du 21 décembre 2022
27. Pollutions aux PFAS à Spinetta Marengo par la société Solvay : Article du journal RTBF du 21 décembre 2022
28. Pollution aux PFAS au sud de Lyon, ARS Auvergne-Rhône-Alpe, 16 février 2023
29. Seuil de sécurité pour l’exposition aux PFAS par l’intermédiaire de l’alimentation : communiqué de l’EFSA, septembre 2020