Janvier 2025

Vous vivez près d’une usine polluante ou dans une zone touchée par des déchets ? Vous vous sentez constamment inquiet pour votre santé ou celle de vos proches ? Ce stress, souvent sous-estimé, peut être reconnu juridiquement : c’est ce qu’on appelle le préjudice d’anxiété.
Le préjudice d’anxiété permet d’obtenir la réparation de l’inquiétude ressentie en raison de l’exposition à des substances toxiques, alors qu’aucune maladie n’est déclarée.
En France, de plus en plus de victimes de pollution obtiennent réparation pour les souffrances psychologiques causées par l’exposition à des risques environnementaux graves.
Cet article vous explique comment faire valoir vos droits, obtenir justice et réparation face à une situation anxiogène liée à la pollution.
Découvrez comment vous protéger grâce au droit de l’environnement !
➤ Qu’est-ce que le préjudice d’anxiété ?
Le préjudice d’anxiété vient réparer le fait d’être exposé à toute substance nocive ou toxique générant un risque élevé de développer une pathologie grave.
C’est un concept juridique permettant de reconnaître et de réparer la souffrance psychologique éprouvée par une personne exposée à un danger grave pour sa santé.
Ce préjudice est lié à la crainte permanente d’être atteint par une maladie ou d’autres conséquences néfastes, notamment en raison de conditions de travail dangereuses, de pollution ou d’exposition à des substances toxiques.
D’abord reconnu dans les années 2000 pour les travailleurs exposés à l’amiante, le préjudice d’anxiété s’applique désormais à des situations variées, incluant les victimes de pollution environnementale.
Aussi, si vous vivez dans une zone contaminée ou êtes exposé à des risques écologiques avérés, vous pouvez demander une réparation financière pour la souffrance psychologique subie.
➤ Qui peut réclamer une réparation pour préjudice d’anxiété lié à la pollution ?
Le préjudice d’anxiété s’adresse aux personnes qui, sans être encore malades, vivent dans une angoisse permanente de développer une pathologie liée à une exposition à des produits toxiques ou polluants.
Les victimes de pollution environnementale peuvent inclure :
- les personnes résidant près de sites industriels ou usines fortement polluants ;
- les habitants de zones où l’eau ou le sol est contaminé par des produits chimiques ;
- les riverains de zones d’accumulation de déchets toxiques ;
- les populations affectées par des catastrophes écologiques comme les marées noires ou les explosions industrielles.
L’élément clé pour établir le préjudice d’anxiété est de prouver une exposition prolongée à un risque grave, justifiant la crainte constante pour votre santé.
➤ Comment prouver son exposition à une pollution grave ?
Si vous êtes exposé à une pollution grave et que cette situation affecte votre santé mentale, plusieurs étapes peuvent vous permettre d’obtenir réparation pour le préjudice d’anxiété :
ETAPE 1 : Collecter les preuves d’exposition à la pollution
Pour que votre demande de réparation soit recevable, vous devez démontrer que vous êtes réellement exposé à un danger environnemental avéré.
Les preuves peuvent être :
- des études scientifiques ou rapports établissant la présence de polluants toxiques dans votre environnement immédiat ;
- des analyses médicales ou expertises démontrant un risque accru de maladies ;
- des témoignages ou preuves d’incidents polluants récurrents près de chez vous.
Voici des exemples concrets (liste non-exhaustive) :
➾ diagnostic environnemental et résultats d’analyse ;
➾ avis du Haut conseil de la santé publique ;
➾ fiches toxicologiques et fiches d’information sur les polluants présents ;
➾ études de Santé publique France ;
➾ attestation d’un toxicologue sur les risques encourus ;
➾ rapports issus de centre de recherches universitaires.
ETAPE 2 : Démontrer l’impact psychologique
Le préjudice d’anxiété repose sur la souffrance psychologique liée à la crainte constante d’être affecté par la pollution.
Vous devrez donc prouver que cette situation a généré un stress important et durable.
Voici comment :
- consulter un médecin ou un psychologue pour établir un diagnostic de troubles liés à l’anxiété ;
- obtenir des certificats médicaux confirmant l’état d’anxiété ou de stress chronique ;
- constituer un dossier avec des témoignages de proches, voisins ou collègues attestant de votre état.

➤ Quel montant de réparation pour un préjudice d’anxiété ?
Le montant de la réparation accordée pour un préjudice d’anxiété varie en fonction de la gravité de la situation et de l’intensité de la souffrance psychologique éprouvée.
En général, les compensations peuvent aller de quelques milliers à plusieurs dizaines de milliers d’euros, en fonction des dossiers.
Chaque cas est unique, et les tribunaux évaluent les éléments fournis pour fixer le montant des dommages et intérêts.
Le cabinet KAIZEN AVOCAT a obtenu la réparation du préjudice d’anxiété pour de nombreuses victimes, avec des montants allant jusqu’à 20 000 euros par personne.
Voici quelques jurisprudences obtenues par le cabinet, afin d’illustrer la réparation du préjudice d’anxiété :
→ Cour d’Appel de Lyon, 20 octobre 2022, n°21/08664
Contexte : un couple a vécu pendant plus de dix ans dans un bien pollué aux solvants chlorés, aux hydrocarbures, aux métaux lourds, aux dioxines et furanes.
Avec la crainte d’un effet cocktail, désignant les effets de l’interaction des polluants entre eux.
Montant de la réparation : 20 000 € par personne.
→ Cour d’Appel de Lyon, 9 avril 2024, n°23/03562
Contexte : une mère et sa fille de 12 ans ont logé pendant plus d’un an et demi dans un logement qui s’est avéré être extrêmement dangereux compte tenu de la pollution de l’air intérieur (taux en trichloroéthylène 4 000 fois supérieur aux seuils).
Cette famille a été relogée en urgence par l’Etat suite à la réception des résultats des investigations menées dans leur logement.
Montant de la réparation : 15 000 € pour la mère et 20 000 € pour l’enfant.
→ Cour d’Appel de Chambéry, 24 septembre 2024, n°23/01154
Contexte : une personne a vécu plus de douze ans sur un site gravement pollué, notamment par des substances dont le caractère cancérogène est avéré. La Cour d’appel a constaté qu’il existait un risque élevé de développer une pathologie grave.
Montant de la réparation : 15 000 €.
→ Tribunal judiciaire de Chambéry, 18 mars 2024, n°23/00328
Contexte : un couple et leur enfant ont vécu pendant cinq ans dans un logement dont l’air intérieur était gravement pollué aux solvants chlorés.
La mère était enceinte lorsque la famille a été relogée en urgence, compte tenu des risques avérés pour leur santé.
Or, les femmes enceintes, les fœtus et les enfants sont particulièrement vulnérables à l’exposition à des substances toxiques.
Montant de la réparation : 15 000 € pour chaque parent et 20 000 € pour chaque enfant.
→ Tribunal judiciaire de Lyon, 11 septembre 2024, n°22/09796
Contexte : un couple vit dans un site pollué à risque depuis 2018. Leur enfant y est né et y vit depuis sa naissance.
Montant de la réparation : 15 000 € chacun, au vu de la nature et de la toxicité des substances polluantes et de l’absence de toute mesure de dépollution.
La réparation du préjudice d’anxiété des victimes de pollution s’inscrit dans le contentieux plus large de la santé environnementale.
⫸ Vous pouvez en savoir plus en consultant notre article de blog ici.
➤ Comment agir pour obtenir réparation de son préjudice d’anxiété ?

Si vous avez rassemblé les preuves nécessaires, vous pouvez engager une procédure pour obtenir réparation.
Le recours se fait généralement devant les tribunaux civils, avec l’aide d’un avocat spécialisé en droit de l’environnement.
Vous devrez démontrer :
- que vous êtes exposé à un danger avéré pour votre santé ;
- que cette exposition génère une anxiété permanente et justifiée ;
- que vous avez droit à une compensation pour ce préjudice d’anxiété.
Le préjudice d’anxiété est une notion complexe à prouver et à faire reconnaître, surtout lorsqu’il s’agit de pollution environnementale.
C’est pourquoi il est essentiel d’être accompagné par un avocat spécialisé dans ce domaine. Ce dernier vous aidera à :
- constituer un dossier solide avec toutes les preuves nécessaires ;
- vous représenter devant les tribunaux et défendre vos droits ;
- optimiser vos chances d’obtenir une réparation à la hauteur du préjudice subi.
➤ Quelle est la différence entre le préjudice d’anxiété et le préjudice moral ?
Le préjudice d’anxiété et le préjudice moral sont deux postes de préjudices distincts l’un de l’autre.
L’objet du préjudice d’anxiété est de réparer, spécifiquement, la crainte de développer une pathologie du fait d’une exposition à une ou plusieurs substance(s) toxique(s).
Les victimes de pollution sont ainsi placées dans une position d’expectative anxiogène permanente, ne sachant pas quels seront les effets, si effet il y a, de leur exposition à des substances toxiques.
L’objet du préjudice moral est de réparer les atteintes aux sentiments de la victime, à l’origine de dommages psychologiques ou émotionnels.
Dans le cas des victimes de pollution, le préjudice moral peut être causé par de nombreux facteurs : stupeur lors de la découverte de la pollution, sentiment de tromperie, impossibilité de vivre une vie familiale normale, temps et énergie dédiés à la gestion de la problématique et du litige, etc…
Les victimes de pollution peuvent donc à la fois demander la réparation de leur préjudice d’anxiété et de leur préjudice moral – et de tout autre préjudice subi du fait de leur situation particulière.

Que retenir ?
Si vous êtes exposé à une pollution grave et que vous vivez dans l’angoisse permanente des conséquences sur votre santé, vous pouvez obtenir réparation grâce au préjudice d’anxiété.
Ce mécanisme juridique, initialement conçu pour les travailleurs exposés à l’amiante, s’étend désormais à toutes les victimes de risques environnementaux.
Le préjudice d’anxiété vise à réparer la crainte de développer une pathologie de fait de l’exposition à une substance nocive ou toxique.
La réparation du préjudice d’anxiété, distinct du préjudice moral, peut être demandée par les victimes de pollution.
Il convient alors de démontrer son exposition à des substances nocives ou toxiques et la dangerosité de ces derniers sur la santé humaine.
Avec l’aide d’un avocat en droit de l’environnement, vous pouvez faire valoir vos droits et obtenir une compensation pour la souffrance psychologique subie.
Références
► Définition du préjudice d’anxiété (amiante) : arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation, 11 mai 2010, n°09-42241 et s.
► Étendue du préjudice d’anxiété (substance nocive ou toxique) : arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation, 11 septembre 2019, n°17-25300 et s.
► Fondement de la responsabilité délictuelle : article 1240 du code civil